
Stop au viol de notre plus grande ressource : le pouvoir aux femmes et filles de la RDC !
Samedi 24 novembre 2007. Bukavu. Plus de 3.000 personnes. De nombreuses personalités politiques, civiles, judiciaires et militaires, diplomatiques.
16 jours d’activisme pour dénoncer la scandaleuse impunité des auteurs de violences sexuelles.
La première Dame, Mme Olive Lembe Kabila, épouse du Chef de l’Etat de la République Démocratique du Congo a fait l’honneur de sa présence pour compatir à la souffrance des femmes victimes de « crimes des lâches ».
La journée a débuté par une marche vers le collège Alfajiri où étaient prévus des discours, un ballet et un cocktail.
La marche, grandiose, a drainé des femmes, toutes de noir vêtues, avec des pancartes, banderoles et calicots où l’on pouvait lire plusieurs messages contre la violence, pour le respect des droits de la femme.
Parties de la place de l’indépendance, du rond-point ISP et du gouvernorat de province, elles ont marché sous le rythme de la fanfare et bonne escorte de la police.
Les associations et organisations de la société civile, les institutions publiques, les ONG internationales se sont mobilisés de manière exemplaire !
Le président de l’assemblée nationale, Vital Kamerhe, Madame Philomène Omatuku, ministre de la Condition féminine, Femme et Famille, des ministres nationaux et provinciaux, des sénateurs, 9 ambassadeurs et 4 hauts fonctionnaires internationaux ont voulu être présent à cette manifestation où symboles d’espoir et réalités dramatiques se confondent.
Est-ce la démonstration politique majeure de mettre enfin un terme à tous ces crimes, que tout le monde attend et en premiers, les femmes ?
Parmi le panel des ambassadeurs se trouvaient Nick Kay de Grande Bretagne, Ellen Berenbs Vergunst des Pays-Bas, Johan Swinen de Belgique, Miguel Fernandez-Palacios d’Espagne, Bernard Prévost de France, Madame Sigrid Johnson du Canada, Helmut R. Klitz, d’Allemagne, l’ambassadeur de Suède, Stephen Haykins chargé d’affaires de l’ambassade des Etats-Unis, et Ross Mountain, représentant des Nations-Unies, un délégué de l’EUSEC EUFOR, un représentant de l’Union Européenne, Antony Bloomberg, représentant national de l’UNICEF en RDC, Margaret Agama représentante de l’UNFPA, etc…
Chaque délégation a été invitée à prendre la parole.
Mme Eve Ensler, initiatrice du mouvement V-Day, a lancé un appel vibrant pour que cette situation change.
Ecrivaine américaine, auteur célèbre des « Monologues du Vagin », Mme Ensler a fondé le Mouvement V-day pour mettre fin à la violence contre les femmes et les filles.
Le site Web www.vday.org reprend l’ensemble de son action et toutes les informations voulues.
Mme Justine Magala a réalisé un ballet riche en émotion où chorégraphie, folklore et poésie étaient harmonieusement mixés…
Quelques personnalités dans la tribune n’ont pu retenir leurs larmes devant cette courte scène qui a fait vivre à tous, l’atrocité des viols et ses conséquences.
La veille, s’était tenu à l’hôtel Mont Kahuzi, une après-midi de plaidoyer au cours de laquelle Mme José Kambaji, Chef de Division provinciale de la Condition féminine et famille, le Chef de bureau de la Monuc, Alfa Sow, la chef de bureau de l’Unicef à Bukavu, Mme Eve Ensler, Mme Eugénie Barhaluga de la section protection à l’Unicef Bukavu se sont succédés pour exprimer des mots de circonstances devant des autorités civiles et militaires directement concernées par la mise en application des sanctions.
Après le débat et la projection d’un documentaire sur les violences sexuelles, ces hauts responsables ont publiquement signé un acte d’engagement à mettre fin à l’impunité.
Mr Jean-Paul Ngongo de la synergie provinciale de lutte contre les violences sexuelles a donné les statistiques selon lesquelles 40% des victimes sont des personnes à l’âge de reproduction…
Mr Luc Henkinbrant en charge des droits de l’homme à la Monuc a brossé la réalité de l’impunité des auteurs dont les principaux sont issus de groupes armés. L’impunité est due à l’insuffisance des ressources judiciaires, la faiblesse de l’exécution des jugements, la difficulté d’accès à la justice, suggérant que stopper le viol passe par arrêter le violeur !
Le vice Gouverneur, Bernard Watunakanza a pris l’engagement de traquer les violeurs jusque dans leur dernier retranchement et de les déférer devant la justice.
Cet engagement sera partagé par le commandant de la 10ème Région militaire, le Général Sylvain Tshikwej et l’inspecteur provincial de la police, le Général Gaston Lunzembo ainsi que l’auditeur militaire supérieur et le 1er président de la cour militaire.
Les députés représentés par Mr Muhasanya ont pris l’engagement de voter des lois et d’interpeller en la matière.
L’avocat général Jacques Melimeli a informé qu’entre 2005 et 2007, 444 prévenus ont été poursuivis pour viols. Parmi eux, 363 dossiers ont été envoyés en fixation ou sont en cours, 147 ont été déférés devant les tribunaux, 226 ont toujours leurs dossiers en cours et seulement 81 dossiers ont été classés sans suite faute de preuves. Dans les prisons de la province, 61 personnes sont en détention pour viol. Il a demandé de recourir à l’éducation des masses, à l’implication de tous dans la sensibilisation.
Le 1er Président de la Cour d’Appel, Marc Ilunga a montré qu’il n’est pas juste que seuls les petits violeurs soient traqués et punis pendant que les grands auteurs de viols ne sont pas inquiétés.
Le matin de cette journée du 23, à Panzi, Mme Ensler a posé la première pierre de la « Cité de la Joie » qui hébergera plus de 100 femmes en attente de soins, non loin de l’hôpital où elles suivront le traitement.
Les 16 jours d’activisme marquent le début d’un long processus de la transformation des mentalités et de comportements ;
Des dates sont retenues à partir ce 24 novembre 2007, lancement officiel de la campagne en RD Congo, à Bukavu : 25 novembre – 10 décembre 07 : 16 jours d’activisme, 14 février 2008 : V-day, 8 mars 08 : Fête de la femme, 25 novembre -10 décembre 08: 16 jours d’activisme, 14 février 2009 : V-day dédiée aux femmes de RD Congo, 8 mars 2009: Fête de la femme.
Il n’y a donc pas de fatalité.
La V-Day sera la journée célébrant la victoire sur les crimes de violences sexuelles.
Commentaires
Certes beaucoup de questions restent à résoudre pour que cette ignominie prenne fin…
Cela dépend de la volonté de chaque pouvoir, politique, civil et militaire, de la bonne gouvernance, de l’éducation à l’école – voir le document effectué à Kalemie, si je savais, du paiement des fonctionnaires, de l’économie, de la résolution complexe de tous les problèmes dûs à la guerre, les bandes armées, les réfugiés…
Voir autant de personnalités rassemblées à Bukavu, autour d’une même préoccupation, c’est encourageant…
Plutôt que de croire à une belle et coûteuse manifestation d’intention qui n’aurait pas de suite, nous préferons voir des personnes engagées à défendre les droits humains et les encourager à continuer, et pour les autres, à tenir parole !
Documentation
> Eve Ensler « Les Monologues du vagin »
> Viol (Fr) – > Rape (Anglais)
> The NY Ttimes : Rape Epidemic Raises Trauma of Congo War
Sites à consulter